Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Ateliers d'écriture et d'accompagnement à Montpellier ou par Zoom
Newsletter
Publicité
Archives
6 août 2009

Mélodie 2, par Th.F. Crassous

  Il est pourtant fier de son nom et le clame bien haut. Son père, noblesse hollandaise, lui a montré son devoir : il s’y plie avec charme et met tout le monde dans sa poche. Il est adulé des médias ainsi que des v.i.p.

  A ses dix-huit ans, il avait été reçu par la Reine Elisabeth en personne au château de Winsor. Il n’en tire aucune gloire. Car seul lui importe de faire de son mieux son métier de musicien et surtout d’exécuter le Concerto d’Aranjuez avec célérité sur sa vieille et aimante guitare…

  Malgré cette aisance apparente, il demeure souvent plongé dans ses pensées profondes. Il lui manque quelqu’un.  Il ne sait pas qui. Il a été choyé en étant tout petit, sa mère le dorlotait bien plus que de raison… Mais il a toujours su qu’il avait été adopté à Paris. Peut-être son énigmatique sentiment de manque venait-il de là ? Plus tard il rechercherait sa mère biologique. Pour l’instant seul comptait ce concert en Amérique où il serait confronté avec deux autres artistes. Ils joueraient ensemble le Concerto aimé, le Concerto D’Aranjuez.

 

                                      °°°
épisode précédent : 1   épisodes suivants: 3   4   5
 

  Mélodie, 2e épisode
épisode précédent : 1   épisodes suivants: 3   4   5

  A Paris, une jeune fille de vingt trois ans, blonde aux yeux pervenche, mèche rebelle sur le front, au menton une fossette, rieuse et fière, joue l’air du concerto d’Aranjuez. Elle y donne son âme. Les vibratos et trémolos s’arpègent sous ses doigts fuselés. Elle a étudié au Conservatoire de Paris et a passé avec brio les concours jusqu’à se produire elle aussi sur les cènes des Opéras mondiaux les plus prestigieux : Salle Gaveau d’abord puis entre autres au Carnegie Hall à New York et à la Scala de Milan. Son père industriel et sa mère musicienne ont fait qu’elle a pu choisir son métier. Son papa aurait bien voulu qu’elle reprenne son entreprise mais elle n’avait aucun goût pour être une femme d’affaires. Rêveuse, elle préférait partager la passion de sa mère pour la musique. Manuella, prénommée ainsi car sa maman est Italienne, s’était ainsi dirigée naturellement vers une discipline qu’elle adorait. Aujourd’hui spécialiste reconnue de guitare, elle aimait par dessus tout ce Concerto.

  Mais dans sa jeunesse heureuse et comblée, il lui manquait souvent quelque chose ou quelqu’un. Elle le cherchait partout et ne s’expliquait pas ce sentiment d’abandon et de mélancolie qui la laissait prostrée pendant des jours entiers. Elle avait la sensation d’avoir un cœur coupé, une mutilation qu’elle ne pouvait définir. Un je ne sais quoi qui la faisait frémir et penser à quelqu’un qu’elle reconnaîtrait pourtant. Un autre elle-même.

  « Un autre être vous manque et tout est désolé » disait Lamartine et c’était bien cela qu’elle ressentait souvent. Pourtant ses parents et ses amis étaient près d’elle et l’accompagnaient dans ses déplacements.

En Namibie, un jeune homme dégingandé, fossette au menton, œil dévastateur aux couleurs de pervenche, traverse la vie sans trop se la fouler. Il a vingt trois ans et se nomme Manuel.  Bien sûr il a étudié comme tous les enfants jusqu’au bac puisque son père,  propriétaire terrien fortuné, le voulait mais au fond de lui, il est un artiste, un homme mystérieux qui tombe toutes les filles. Beau parleur, élégant dans un frac noir, écharpe de soie blanche, il donne lui aussi des concerts. Teint à peine buriné, un rien lui suffit et il ne s’encombre pas de tout cet artifice qu’ont les riches. Il dit tout de go ce qu’il pense, mais personne ne lui tient rigueur car il le susurre avec un air blagueur. Il reste un enfant insouciant. Rêveur, il écoute les disques des poètes et des musiciens célèbres. Son savoir est éclectique car il s’intéresse à tout. Rien n’a de secret pour lui. Il touche avec facilité à tous les domaines, parle l’Anglais, l’Allemand, le Français. Il a pour compagnon aussi bien des artistes, des personnes de la haute société, que des Noirs des classes populaires ou des indigents. Il aime ses amis pour eux-mêmes et non pour ce qu’ils représentent.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité