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24 octobre 2009

Un après-midi chargé, par Béatrice Laudicina

Le Crédit Lyonnais un vendredi après-midi, la queue au guichet. Il  y avait trente ans, la précieuse, si précieuse carte bleue n’était pas encore née. Eva calcula grosso modo qu’elle en avait au moins pour une demi-heure d’attente. Son esprit, jamais en repos, s’évada et récapitula ce qui lui restait à faire : passer à la librairie pour enfants acheter « Petit ours brun dit non » pour sa petite nièce qui, à deux ans, traversait une phase d’opposition systématique ; s’arrêter chez le photographe pour chercher le développement de ses vacances en Grèce ; aller admirer la nouvelle vaisselle de chez Geneviève Lethu, les dernières tissus d’ameublement chez Bienvenue, aller acheter une composition florale aux couleurs vives pour son amie hospitalisée, faire un tour chez le disquaire écouter le dernier Francis Cabrel, passer au cinéma consulter l’horaire des films, en profiter pour s’arrêter aux Nouvelles galeries, acheter des billets de loto (on était le vendredi 13), passer chez Agatha pour admirer les derniers bracelets à la mode, aller chez Martelle, le grand libraire d’Amiens, pour acquérir un ou deux bons romans policiers, s’arrêter devant le parvis de la cathédrale pour contempler encore une fois l’ange pleureur, faire un tour de calèche autour du célèbre monument, pourquoi pas ? Et, pour finir cet après-midi bien chargé, se reposer devant un délicieux chocolat chaud à la vanille qu’elle dégusterait chez Arthur.

Ah oui ! il ne fallait pas oublier le permis de conduire qu’elle passerait une semaine plus tard : Eva avait besoin d’une boite de Sympathil (des comprimés légers contre l’anxiété, vendus d’ailleurs sans ordonnance).

Elle en était donc arrivée à la rubrique pharmacie quand l’homme derrière son guichet – costume à cravate, petites lunettes cerclées d’or – lui déclara : « Je vous écoute. » Alors, perdue dans ses pensées, elle demanda un tube de Sympathil. Lui, les lèvres pincées, le visage impassible, lui demanda de répéter : il n’avait pas bien compris. Lasse, elle avec insistance néanmoins, elle réitéra sa demande. Ce pharmacien ne connaissait pas ce médicament ? C’était curieux !

Alors le caissier, sans se départir de son air coincé et sérieux, lui déclara, d’un ton légèrement offensé : « Mais Madame, nous sommes dans une banque ! »

Réalisant enfin son erreur, devant le ridicule de la situation, Eva ne put s’empêcher d’éclater de rire. Le client qui la suivait, et qui avait entendu toute la conversation, lui fit chorus.

Béatrice Laudicina

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Commentaires
J
Honnêtement (si l'on peut dire avec tous les ennuis qu'ils nous ont causés et la crise qu'ils ont provoquée) je pense que les banquiers gagneraient à connaître "Sympathil" et que nous aurions tous grand besoin d'une cure de désintoxication de leurs "produits".<br /> <br /> Jean-Claude
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