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26 mars 2012

Sauvée de justesse, par Danièle Chauvin

Piste d'écriture: jouer sur l'ambiguité pour créer une nouvelle à chute, ou à retournement.

Sauvée de justesse

 

Enfin Raymond a pris conscience de l’urgence de me conduire chez le spécialiste ! J’ai bien cru que j’allais mourir à la tâche sans que personne ne se soucie de moi.

Depuis un bon moment, je ne saurais dire depuis quand exactement, je tousse. Au lieu de s’inquiéter, Raymond me gronde et rouspète parce que je ne lui obéis pas instantanément. Il ne s’étonne même pas de voir ma santé s’affaiblir. Depuis l’achat de la nouvelle maison, il me fait porter et transporter toutes sortes de choses plus lourdes et plus sales les unes que les autres. Cela a commencé par le déblayage des gravats de la cuisine. J’ai passé le premier jour à aller et revenir de la maison à la déchetterie avec Raymond, pour évacuer les parpaings cassés, les ferrailles et les vieux carrelages. Puis, nous avons rapporté du plâtre, des pots de peinture, des carreaux de céramique, des appareils ménagers. Quand est venu le tour de la machine à laver, j’ai bien cru que nous n’y arriverions pas. C’est affreusement lourd ces trucs-là, et encombrants. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à m’essouffler sérieusement.

Mais Raymond n’a pas semblé s’en inquiéter. On aménageait le jardin à présent. À chaque effort supplémentaire, je sentais que mes forces m’abandonnaient un peu plus. Lorsqu’il a fallu grimper sur le talus derrière la maison pour y déposer les sacs de terre arable, j’ai cru défaillir. Même Raymond a pensé que je ne pourrais pas y arriver. Alors là, il a hurlé. « C’est pas possible, comment j’vais faire moi, maint’nant ? Et qui va me dépanner hein ! Avance ! Feignasse ! Qu’est-ce que tu crois, hein ? C’est pas fini, l’travail. J’ai encore deux aller-retour à me coltiner. Y s’agit pas de t’arrêter maintenant. C’est pas l’moment ! » Là-dessus, j’ai eu un sursaut de vigueur, mais pour combien de temps ? Nous avons tant bien que mal rapporté toute la terre nécessaire et Raymond s’est enfin calmé.

« Ouf ! Le plus gros est fait. Finalement, t’as tenu l’coup jusqu’à la fin. T’es ben brave. J’ai ben eu peur qu’tum’lâches ! Bon, je vais t’faire soigner à présent qu’ nous avons un peu d’ temps. » D’un coup, je me suis sentie ravigotée. Ce Raymond n’est pas si méchant qu’il paraît. Il est dur à la tâche et ne s’arrête lui-même qu’à la dernière extrémité. D’ailleurs cela lui avait valu une immobilisation de deux semaines par le passé pour un lumbago sous-estimé. L’ennui, c’est qu’il est comme ça avec tout le monde en général et avec moi en particulier.

Enfin, aujourd’hui, je me repose, je me laisse faire. On m’ausculte, on diagnostique. Il paraît que ce n’est pas grave puisque c’est pris à temps. C’est ce que j’entends dire par les personnes qui s’occupent de moi.

Quand Raymond revient me chercher, il est tout heureux de me retrouver. « Dis donc, Raymond, il était temps que tu me l’amènes ta guimbarde ! Encore cinq kilomètres et elle ne démarrait plus du tout !  Allez je te l’ai remise en état de marche pour un bon moment. Ça te fera trois cent cinquante euros. » « Eh ben dis donc, c’est pas donné tout d’même !  rechigne Raymond »

« Toujours à râler, Raymond. Mais je l’aime bien. D’ailleurs, est-ce que j’ai le choix ? Vroum Vroum. »

 

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