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15 avril 2013

Le moine surpris, par Michèle Lapalme

 

Piste d'écriture: les toiles qu'Ivan Dmitriev, jeune artiste avignonais, a prêtées à l'atelier d'écriture durant une semaine. Elles étaient 4, toutes dans des tons noir et blanc, et dans une tonalité fantastique. 
ivandmitriev90@gmail.com, ou https://www.facebook.com/#!/pages/MOLOTOFS-ART/437600772983980?bookmark_t=page

Le moine surpris

 

Le_moineDans la force de l’âge, il s’en est venu à pied vers l’Abbaye, traversant la grande plaine de la Beauce vers la fin du jour. La porte s’ouvrit sur lui et se referma pour toujours.

Il jeta un dernier regard autour de lui, pour évaluer une dernière fois le monde qu’il ne reverrait jamais : le long chemin poussiéreux menant au hameau, la cour d’une ferme où une très jeune fille tirait de l’eau fraîche d’un puits. Pureté pour pureté.

 

Le temps a fait son œuvre. Cette vie de reclus a marqué doublement ses traits. Une grosse ride sous l’œil gauche, l’amertume de toute une vie déformant la bouche sensuelle où les lèvres charnues se crispent dans un rictus fortuit… l’asymétrie du visage et ce menton lourd à peine allégé par une fossette, laisse à penser à une certaine veulerie, mêlée d’inconséquence.

Le regard noir et profond trahit l’homme conscient d’avoir perdu la liberté à jamais.

Il est arrivé à la moitié de sa vie. N’ayant pas eu maille à partir avec le moins, il ne brûlera pas sur le bûcher de l’Inquisition, à moins d’une dernière diablerie de son existence : il a tué jadis.

 

le_b_lierDans son lit spartiate, il rêve au diable, justement. Après tout, le diable n’est jamais bien loin du bon dieu. Il lui apparaît masqué, point trop méchant, un peu tracassin, le démon sortant de sa boîte. Seuls peut-être les enfants pourraient s’en offusquer. Son sourire large comme la blessure d’une faux n’est pas si désespérant. Il fait penser à un masque africain, pays où il n’est pas si important d’être mort ou vivant finalement.

Son rêve s’arrête, le moine est démuni il bande ses forces pour en retrouver la trame interrompue.

Le haut du visage lui apparaît Deux grands yeux ronds comme des yeux de femme derrière un loup vénitien. Des yeux de braise. Des yeux dont, jeune, il a éteint la lumière.

Vade retro, Satanas !

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