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20 septembre 2013

L'ennui, par Frédérique

Première piste d'écriture de cette année, qui m'a été inspirée par le très beau livre de David Bosc, A la Claire fontaine: écrire avec tous ses sens, pas seulement avec ses yeux; écrire avec son corps. Bonheur de retrouver la grâce de l'écriture de Frédérique...

L’ennui

fred21_9_13Les fenêtres ouvertes de la chambre du haut laissent entrer la chaleur et la douleur d’un été sans fin. D’un été si long qu’il a étourdi de torpeur chaque coin de la maison, qu’il a balayé avec lui toutes les envies.

L’homme, fatigué, harassé par l’ennui lutte contre le sommeil. Le soleil du mois d’août a tapé si fort que sa tête ne tient plus. Elle roule sur l’oreiller humide de sueur. Vide et pleine à la fois. Lourde et envahissante. Le corps allongé sur le lit ne bouge pas. Il s’enfonce dans les draps roses. L’air n’entre plus depuis des semaines. On étouffe.

 

L’homme étouffe de n’attraper aucun désir, pas même celui de se lever et d’aller jusqu’au jardin. D’offrir son corps à l’eau fraîche du bassin. Il se contente de l’imaginer. Dans la brume de sa tête vide, de sa tête pleine. Il goûte l’eau qui se penche, qui coule, qui chante. Il ne se baigne que dans sa rêverie et dans l’absence de sensations vives. Il se noie dans sa difficulté à respirer.

 

Ce qu’il croit très fort, c’est que personne au dehors ne l’attend. Personne pour lui crier que l’été se finit, que l’automne s’en vient. Que le vent va remettre de l’ordre et aérer la pièce et ses idées.

Il pense très fort que personne ne sera là pour lui rappeler que chaque année c’est pareil. Qu’en septembre il se remet, tout seul, debout.

Il est en train de l’oublier. Les idées sont figées. La mémoire est éteinte.

La lumière s’est encastrée sous les paupières impossibles à soulever.

 

La famille, pourtant, est là, sous ses yeux.

Et tous se sont rendus au jardin. Tous parlent, s’apostrophent, se réprimandent.

Impossible de ne pas les entendre.

A moins d’avoir fermé la porte à clé.

La vie est là, sous le cœur de l’homme, dans ses racines. Elle coule dans son sang qui reste froid.

L’homme a du mal.

Jusqu’à ce qu’il accepte : le bruit, le mouvement, le retour à la lumière.

 

L’odeur du café, celle des croissants viennent enfin chatouiller son nez.

Il éternue sa joie. Il a passé l’été allongé, laissé l’ennui le visiter jusqu’à se désespérer. Mais l’automne tape à sa porte. Acajou, farceur et peu soucieux de lui, il joue. Frappe plusieurs coups.

L’homme entend ça avant le reste. Avant la famille.

Et se redresse.

 

Frédérique, Le 16-9-13

Illustration: collage de l'auteure.

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