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23 novembre 2007

Un gratin gratiné !, par Nicole

 

 

 

 

Joséphine poussa un cri et lâcha l’éplucheur. Le couteau avait dérapé sur la pomme de terre et entaillé largement la peau à la naissance du poignet.

 

Du sang, du sang partout, et pourtant elle n’a même pas mal. Pas encore. Elle regarde un peu étonnée ce liquide rouge et chaud qui s’écoule, et reste sans réaction quelques instants.

 

Un semblant de douleur la rappelle à la réalité. Sa première pensée est d’agacement contre elle-même. Quelle maladroite ! Elle est déjà en retard pour son dîner de 14 personnes dans deux heures !

Un peu de calcul mental : le gratin doit cuire pendant une heure quinze, pendant ce temps, elle peut se pomponner et mettre la table. Donc il lui reste trois quarts d’heure pour finir l’épluchage, couper les pommes de terre en rondelles (fines, c’est meilleur) ajouter ail, lait et crème, sans oublier l’assaisonnement, et… se soigner !

D’abord arrêter le sang. Heureusement qu’elle n’avait que le gratin à faire. Le reste pouvait se préparer à l’avance, c’est beau l’organisation ! Mais revenons à cette coupure, qui commence vraiment à faire mal. « Pourvu que je ne me sois pas ouvert une veine, je pourrais me vider de mon sang lentement, et les invités me trouveraient là, allongée sans vie sur le carrelage, et… » le téléphone sonne !

Bien sûr elle se précipite pour répondre, en laissant des traces de sang un peu partout. Il va falloir nettoyer tout à l’heure : est-ce qu’elle prendra le temps sur les trois quart d’heure ou sur les une heure quinze ?

Pour l’instant, le plus important est d’écourter la conversation téléphonique avec sa mère. Ce n’est pas facile de lui faire comprendre, sans la vexer, que ce soir, elle n’a vraiment pas le temps. Surtout ne pas commettre l’erreur de lui dire qu’elle vient de se couper, sinon, elle va avoir droit à l’énumération de ce qu’il faut faire pour bien se soigner et éviter l’infection.

Ouf ! Elle a réussit à raccrocher. Il faut qu’elle épluche encore quelques pommes de terre, elle les mettra à tremper, ira se soigner, puis finira l’assemblage du gratin. Il faut toujours être méthodique !

D’ailleurs ce n’est sans doute pas si grave, elle a l’impression que la coupure ne saigne presque plus. Elle passe quand même son bras sous l’eau pour constater les dégâts. Alors qu’elle frotte un peu trop fort du sang séché, l’entaille s’ouvre à nouveau et le saignement repart de plus belle.

C’est à ce moment que la sonnette la fait sursauter. En râlant, elle attrape un torchon qu’elle entortille autour de son poignet et va ouvrir la porte : c’est le fleuriste, avec un énorme bouquet de la part des amis qui viennent ce soir. C’est une charmante attention de lui faire livrer les fleurs en avance pour qu’elle n’ait pas à disparaître un quart d’heure pour les mettre dans un vase quand ils arrivent. Sauf que maintenant, c’est un nouveau quart d’heure de perdu !

Elle doit chercher un vase assez grand et en accord avec la forme du bouquet. Elle voit lequel il lui faut. Mais où est-il ? Comme elle s’en sert rarement, il doit être tout au fond du placard, derrière tous les autres. Il faut qu’elle les sorte tous pour pouvoir l’atteindre. A quatre pattes la tête dans le placard, elle sort les vases un à un et trouve enfin celui qu’elle cherche tout au fond comme prévu. Pour une fois elle ne va pas passer un temps infini à arranger les fleurs : elles s’arrangeront bien toutes seules !

Bon voyons, quelle heure est-il ? Le gratin doit être au four dans un quart d’heure. Elle a le temps de couper les pommes de terre en rondelles, pas de stress. Mais au moment de couper la première, elle s’aperçoit qu’elle n’a pas encore épluché l’ail pour le gratter au fond du plat. Vite elle attrape une gousse, mais elle a les doigts humides, la peau de l’ail reste collée à sa peau à elle. Il faut qu’elle s’essuie les mains, c’est alors qu’elle se rend compte qu’elle a toujours le torchon entortillé autour du bras. Sa coupure lui était sortie de l’esprit. Elle enlève le torchon : ouf, ça ne saigne plus.

Enfin un quart d’heure après le gratin est au four, les pommes de terre bien régulièrement coupées baignant dans un mélange onctueux de crème et de lait.

C’est l’heure de mettre le couvert, tans pis, elle passera un peu moins de temps dans la salle de bains, mais va faire une belle table pour ses invités.

Une demi heure passe et elle contemple fièrement son œuvre. Avant d’aller se changer, elle passe par la cuisine juste pour vérifier que tout va bien. C’est bizarre, aucune odeur ne se dégage du four, elle s’approche et s’aperçoit qu’elle a oublié de l’allumer ! Le thermostat est bien réglé à la bonne température, mais elle n’a pas tourné le bouton de mise en route !

Surtout pas de panique ! Quelle heure est-il ? Il lui reste une demi heure avant l’arrivée des invités mais elle n’est plus à se demander sur quel temps elle va prendre du temps : il faut juste mettre le four en marche et aller se changer. Ah oui et aussi mettre un pansement sur sa coupure pour qu’elle ne se rouvre pas intempestivement.

Donc tout va bien. Elle fera un peu traîner l’apéritif et elle peut aussi compter sur le retard certain de quelques personnes. » De toute façon après un tel début de soirée les choses ne peuvent que s’améliorer » positive-t-elle.

Et elle est tout à fait prête au premier coup de sonnette, bien qu’un peu ébouriffée n’ayant pas eu le temps de s’attarder sur le brushing.

Lorsque les derniers invités sont partis, elle pousse un soupir de soulagement, elle va enfin pouvoir s’occuper correctement de sa coupure qui lui fait assez mal maintenant. Mais la soirée était parfaite, tout était délicieux et le gratin particulièrement réussi, l’avait-on félicité.

 

Nicole

 

 

 

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