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13 décembre 2007

Un jour l’enfance se souvient…, par Carole Menahem-Lilin

 

 

Un jour l’enfance se souvient, l’enfance se représente à vous

 

C’est un regard,

 

Ce sont des craies au pied d’un mur

 

C’est un arbre géant, champion inutile du ciel.

 

 

 

Et il vous vient, sous les paupières

 

Comme une poussée de lilas

 

Avec son odeur qui fait vous sentir à l’étroit dans votre peau

 

Qui vous donne des démangeaisons d’infini…

 

 

 

Pour un peu vous redeviendriez voyante.

 

Vous vous laisseriez surprendre par… par exemple, une pomme

 

Sa densité, son odeur, son orage

 

L’orage délicieux dans votre bouche immense…

 

 

 

Ou vous vous lanceriez à l’assaut des façades

 

Les façades sifflantes, où crèvent les nuages

 

Et les métamorphoses

 

Où gouttent les lessives

 

Où d’indécents regards, par l’écran des fenêtres, vous bombardent de sorts

 

Qui tous vous rapetissent…

 

 

 

Vous oublieriez que vous connaissez bien cela – les pommes, les cordes à linge, les façades morgueuses, les armures en jeans qui là-haut se balancent et sans voix vous défient…

 

 

Vous oublieriez l’idée que vous avez de tout cela – une idée consensuelle, raisonnable – pour y voir les éléments dispersés d’une armée indistincte.

 

 

 

Indistincte mais cruelle.

 

 

 

Vous rentreriez dans la forêt baroque où tout est vu pour la première fois

 

Et où rien ne répond à l’idée qu’on s’en fait.

 

 

 

Vous lèveriez votre propre corps d’armée.

 

Vous lèveriez votre corps.

 

 

 

A nouveau, forte d’une odeur de lilas

 

Guidée par un pommier qui ressemble à votre père –

 

A nouveau vous affronteriez les chevaliers en loque

 

Qui viennent bousculer vos songes idéaux

 

 

 

Puis vous vous bâtiriez un empire provisoire.

 

 

 

Avec quelques cailloux, deux trois bâtons de craie

 

Vous feriez tenir le monde dans un battant de porte…

 

Et tout l’amour que vous ne savez dire, l’enfermeriez

 

Dans une démangeaison de paupières,

 

Des larmes qui ne couleront plus

 

… une exhalaison de lilas.

 

Ce texte est tiré du recueil "Enfances d'écorces", publié aux éditions Souffles.

10 €, commandez chez l'éditeur : jean.pierre.vedrines@cegetel.net

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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