Cueillir, par Marie-France Champeau
Cueillir
Dans le bois des souvenirs
Aux paupières baissées
Cueillir le miroir de l'enfance
Cueillir la main perdue
les murmures évanouis
la chambre muette
et le cri de la nuit .
S'envoler sur l'aîle aveugle
De la chouette souveraine .
Danser au rythme régulier
Des clés gardiennes de la vie .
Cueillir les matins gris
les arbres échevelés
les écharpes rosées
sur le fleuve endormi .
Frissonner aux clochettes brisées
Du rire évanoui.
S'affaisser écrasé de solitude blême
Et dans la nudité
S'effondrer démuni .
Miroirs aux souvenirs
Images renversées
Oiseaux muets le jour
Ensorcelant ma nuit .
Cueillir l'attente
L'attente obscure et apeurée
L'attente aux doigts de suie
Sous son étoile noire .
Cueillir le pas qui vient
Qui appelle et qui chante
Cueillir tous les retours
tous les bras étoilés
l'arbre enfin reverdi
la mort anéantie .
Et paupières closes
Dans les bois assourdis
De pépiements de vie
Ouvrir enfin les mains
les mains rougies
au feu de la douleur
les mains tendresse
aux paroles sourire
et les mains qui espèrent
l'aube de la caresse .
S'ouvrir au monde qui palpite .
Etendre gauchement
l'aîle encore engourdie
Oser l'émerveillement
A l'angle du regard .
Déchirer l'habitude
Aux habits de rengaine
Choisir
à pas menus
L'éclat de l'incertain
et son mystère de promesses .
MF
05 / 2010