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23 mars 2013

Suspect idéal, par Wanda Vitale

Piste d'écriture: la police interroge un suspect...

 

SUSPECT IDEAL

 

Très  tôt ce matin là, l’homme avait été appréhendé à son domicile : voilà trois jours que sa femme n’avait donné signe de vie, une amie très proche avait signalé sa disparition la veille.

Celui-ci  n’avait pas eu le temps de dire : «  ouf ! ».Il s’était débattu, jurant comme un beau diable, criant à qui voulait l’entendre qu’il était innocent, que sa femme était partie chez l’une de ses tantes,  en Sicile, pour quelques jours. Il avait fallu trois gendarmes pour le maitriser. Voilà trois heures qu’il marinait, sans boire ni manger, ni voir qui que ce soit. Il ne cessait d’aller et venir, dans cette pièce grande comme un mouchoir de poche, les mains dans ses cheveux,  encore un peu agité.

Une clé tourna dans la serrure. La porte s’ouvrit sur un rouquin  de taille moyenne, légèrement enrobé, quelques  rares cheveux formant une couronne autour de son  crane. Ses vêtements quelque  peu froissés et sentant le tabac lui donnaient  une allure décontractée, du moins en apparence.

-Bonjour,  commissaire Max Dubout .Excusez- moi de vous avoir fait attendre, un braquage de banque m’a retenu jusqu’à présent, la routine quoi !

 L’homme  se crispa et in petto jura, se demandant  à quel jeu jouait cet abruti , s’il le prenait pour un c…Il préféra se maitriser, pour l’instant .

-Bien , nous allons démarrer l’interrogatoire, mais auparavant, souhaitez- vous un verre d’eau, une tasse de café et un sandwich ?

L’homme  acquiesça du chef et remercia du bout des lèvres, il avait faim et soif. Max ouvrit la porte et passa commande à un coéquipier :

- Bernard, tu voudras bien m’apporter deux cafés et un sandwich, s’il te plait.

Tandis  qu’il mangeait et buvait , Max observait l’incessante agitation des jambes de son vis-à-vis. Il attendit qu’il ait fini de manger et mit le magnétophone en marche : « Lundi 28 Janvier 2013, audition du mari dans  l’affaire de la disparition de Mme Macchiato. »

-Nom, prénom, date de naissance, profession, domicile.

-Macchiato Toni, né le 25 novembre 1965, je suis garagiste, j’habite 3 grand rue à Marseille.

-Vous savez pourquoi vous êtes ici ?

Pas de réponse.

-Vous êtes suspect dans la disparition de votre femme. Elle avait rendez- vous avant-hier après- midi avec son amie, qui l’a attendue  une bonne heure. Ne la voyant pas venir, elle s’est rendue à votre domicile et a frappé à la porte  un petit moment, en vain,  personne n’a répondu. Elle n’en a pas dormi de la nuit, et c’est au matin qu’elle s’est décidée à venir au commissariat et à nous faire part de ses inquiétudes.

Toni n’en pouvant plus se leva comme un ressort et s’écria :

-C’est un coup monté,  pour me nuire, je vous répète qu’elle est partie en voyage.

Sans se départir de son calme et de son sourire bonhomme, Max le pria de se rassoir.

-Je n’ai pas terminé.  Nous allons le contrôler, bien évidemment. Votre femme n’en a pas parlé a sa meilleure amie avec qui elle avait rendez vous, c’est un peu surprenant, ne trouvez- vous pas ?  De plus sa voiture est toujours dans le garage.

Haussant les épaules et levant les yeux au ciel.

-Je l’ai accompagnée à la gare. Vous croyez quelle va se taper deux mille kilomètres en voiture ? Réfléchissez cinq minutes,  bon sang.

-Des voisins vous ont vu ce samedi charger  votre voiture, il faisait déjà nuit, quelle explications en donnez vous ?

-J’ai profité d’être seul pour faire un peu de rangement dans le garage, on entasse des tas de choses en pensant s’en servir plus tard, mais ce n’est jamais le cas, vous savez ce que  c’est n’est ce pas commissaire ?

-Vous avez réponse à tout n’est ce pas ?

Max ne souriait plus, il préleva  quelques feuilles dans un dossier.

-Ceci est une plainte enregistrée l’an dernier, déposée par votre femme. C’est une plainte pour violence conjugale. Cela vous dit quelque chose ?

Toni baissa les yeux et murmura :

 -Je me suis excusé, c’était la seule et unique fois  en quinze ans de mariage. Elle n’était toujours pas à la maison quand je suis rentré du travail, mon sang n’a fait qu’un tour, j’ai eu quelques doutes, je suis jaloux . Je sais ce n’est pas une excuse. Vous devez me croire Mr le commissaire, j’aime ma femme.

-Sans doute, répondit Max et à part lui : c’est ce qu’ils disent tous, ceci n’empêche pas cela.

Il arrêta l’enregistrement.

-Bien,  pour l’instant vous pouvez rentrer chez vous Mr Macchiato, vous restez à notre disposition. Nous devons procéder à quelques vérifications.

Toni senti t son corps se détendre, il se leva et sortit sans un mot.

Un  petit vent soufflait, il releva le col de sa veste, et tout en s’éloignant du commissariat sortit une Camel de sa poche et l’alluma .Cela lui permit d’évacuer, en même temps que la fumée, la tension accumulée ces dernières heures. Il était déjà plus de deux heures de             l’après- midi. Il décida néanmoins d’ouvrir le garage, il avait du travail en retard et cela lui occuperait l’esprit. Il chercha l’arrêt le plus proche et attendit le bus qui le ramènerait. Il était néanmoins  inquiet, que se passait- il dans la tête de cette bonne femme ? Ce soir il téléphonerait  à Sophia et lui raconterait son aventure.   Il lui parlerait  également de son amie et des soupçons qu’elle faisait peser sur lui. Il lui interdirait de la revoir, elle allait devoir choisir.

 Une fois arrivé, il enfila  son bleu de travail, alluma la radio et  la régla sur Nostagie . Il commença par changer  les quatre pneus sur la Fiat Panda de Mme Giroux, aussitôt dit aussitôt fait.  Avant d’entreprendre autre chose, il s’autorisa un petit café sur la nouvelle cafetière Delongui, cadeau  de Noel de sa mère. Il venait juste de poser sa tasse quand le téléphone sonna :

-Garage Macchiato à votre service.

-Bonjour, Mr Macchiato, je suis passée ce matin , comme vous me l’aviez dit, mais vous étiez fermé. Quand puis- je venir chercher ma voiture ?

-Bonjour, Mme Giroux, je suis désolé, j’ai  été appelé pour une urgence, mais vous pouvez venir la chercher, votre voiture est prête.

-Rien de grave j’espère, j’arrive tout de suite.

Toni se remit au travail et s’attaqua à l’embrayage de la Ford Fiesta de Mr Brun.

La pendule marquait dix- neuf  heures,  après le départ de  Mme Giroux, il  s’apprêta à plier boutique. Il rangea son matériel, se décrassa les mains et se changea.

Il rentra chez lui à pied, il aimait bien parcourir les deux kilomètres qui séparaient son lieu de travail de sa maison. C’était un appartement au premier étage d’un petit immeuble de trois, qu’il avait acheté avant de rencontrer Sophie. Il en avait trente alors et elle vingt. Ca avait été le coup de foudre, en tout cas pour lui. Au début de leur relation Sophia ne voyait que par lui. Ces dernières années, en fait depuis qu’elle avait sympathisé avec Jacqueline, une collègue de travail, elle avait pris un peu plus confiance en elle. Il la sentait moins dépendante.

Il en était là de ses réflexions, quand son estomac se rappela à lui, il n’avait mangé  qu’un sandwich de toute la journée, et quel sandwich ! Il s’arrêta faire quelques courses à la superette du quartier, et salua quelques habitués, sans leur  faire la conversation, il avait hâte de téléphoner à sa femme et de se rassurer. Il monta quatre à quatre les escaliers, ouvrit la porte, se précipita sur le répertoire posé sur la table du téléphone et composa, fébrile le numéro de la tante.

Trois sonneries retentirent à deux mille kilomètres de là, il laissa sonner encore deux fois, jura et raccrocha brutalement, personne .Il ré essaya cinq minutes plus tard, au bout de la seconde sonnerie quelqu’un décrocha :

-Allo, qui est à l’appareil ? C’était la zia Maria.

-Bonjour Maria, vous allez bien ? Je voudrai parler à Sophia.

-Sophia, mais que dis tu là ? Elle n’est pas avec toi ? Tu m’inquiètes, que se passe t- il ?

Toni ne savait plus très bien quoi répondre, il hésitait ne voulant pas alarmer la vieille dame, il tenta d’en dire le moins possible et en même temps, il devait savoir ce qui se passait. Il sentait monter en lui un drôle de sentiment.

Etait-il possible que Sophie ne soit pas partie, du moins quelle ne se soit pas rendue là où elle lui avait dit ?

**

A sept cent kilomètres de là, devant un café crème, un sourire aux lèvres Sophie, attendait l’homme pour lequel elle avait tout quitté.                              

Wanda

 

 

                                                                        

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