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13 février 2014

Un matin d'hiver, par Thérèse-Françoise Crassous

 Ce chapitre fait partie d'un roman qui se déroule en Allemagne et en France. Le chapitre prend place deux ans après le mariage de l'héroïne et un déménagement à Nancy.

      Un matin d’hiver

            Que fais-je ici, seule dans cet appartement certes agréable où le soleil mutin me fait des clins d’œil dans toutes les pièces. Mais quand le ciel a mis sa couverture grise à cause des meurtrissures des fumées d’usines et des loques de bruits, je reste collée à la vitre du salon engourdi. Les passants ont beau presser leur allure, l’intérêt de ce jour sans espoir m’interpelle.

             Suis-je vivante encore?
            Objet inconsistant aux yeux de l’amour, je mène une vie d’eau transparente. Coule le quotidien ponctué d’habituelles tâches, ménage,  aspirateur, lave-vaisselle et repas suivis de l’éternel journal où la speakerine aux sourires en éclats renvoie l’image des vides assassins. Miroir étincelant de la fenêtre sur cour où à 5 heures, j’aurai froid malgré la chaudière à fond et les radiateurs en fonte brûlants. Les certitudes se délitent en quenouille.Le travail acharné de l’époux installe un mur d’errance. Le silence bat mon cœur de son fouet maléfique. La suffisance légale engloutit l’endormi dans son château, hanté par les réminiscences de bonheur éblouis. Même la cité n’a plus d’attrait dans mes promenades curieuses. L’emprise du deuil fait fuir la jouissance. Les squelettes du réel creusent une fosse profonde d’ennuis.  Cette métropole régionale où les ors font resplendir la place Stanislas et les jardins rieurs des poussettes criardes sous les brasiers de l’astre, pâlit de soucis et de morosité.

            Chacun s’est retranché dans son univers de désillusions. Quel couple survivra à ce cadavre né dans sa gestation  à ces soupçons de morts ?

            L’hiver n’a de beauté que par les diamants jetés sur les sapins givrés et le regard des gens. Pour l’heure, la gadoue se répand d’aventures avortées, avant d’être lavée par les nuages crevés. Transparente comme l’eau, je vais à la dérive vers un ailleurs sans joie. Femme qui lasse d’être à vif, s’adonne au désespoir. Les minutes sont désertes à portée de la main et le secondes inertes n’accrochent plus les lendemains mornes.

 Combien de temps encore les caresses suspendues ne soulèveront plus la peau de ses chagrins ? Les voix rauques d’avoir versé trop de larmes murmureront-elles des cantilènes ?

Un éclair sourd. Peut-être,  un voyage ouvrira-t-il la perspective d’oublis. Dans l’Italie propice, Rome et ses statues attiseront la flamme qui, un jour, j’en suis sûre, jaillira entre nous et l’amour à nouveau donnera des fruits mûrs.

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