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9 novembre 2020

Voguer jusqu’à VOGÜÉ, par Corinne Christol-Banos

Piste d’écriture : Un lieu qui parait doué d'intentionnalité, qui devient un personnage

 

Et si on se promenait ? me proposa mon amie.

Pourquoi pas ! répondis-je avec enthousiasme. Le ventre lourd de la bonne chair et de ses acolytes en robe rouge, j’envisageais cette sortie avec l’espoir d’une digestion bienvenue.

Le soleil me caressait affectueusement la nuque et le vent en bourrasques me faisait resserrer le col de ma veste.

Descendue de voiture, je levai les yeux et contemplai le lieu où m’avait emmenée mon amie : VOGÜÉ, réputé l’un des plus beaux villagex de France !

Perché tout en haut d’une falaise, il me toisait avec morgue, me narguant de ses pierres brossées par le vent et la pluie. J’attaquai les ruelles en montées escarpées de cet étrange endroit.

Je commençai l’ascension avec entrain, mais dus bien vite ralentir lorsqu’à chaque détour d’une bâtisse, je constatai avec désarroi que le virage suivant était plus ardu encore. Essoufflée et courbée sur moi-même afin de mettre le moins de distance possible entre les pavés râpés par le temps et mon corps qui acceptait mal l’angle à 25° des rues pentues, j’arrivai enfin à me redresser pour jouir du paysage que mes yeux arrondis découvraient avec émerveillement.

De la plateforme où je me trouvais, le village s’offrait tout entier à mes pieds, j’en restai bouche bée devant le spectacle saisissant.

Était-il beau ? ce n’est pas le terme qui m’est venu en le voyant tout entier. Je dirais plutôt sauvage. Oui c’est ça, sauvage ! Comme si la main de l’homme y avait été tolérée. Les pauvres âmes que nous sommes ne peuvent que s’incliner face au travail inimaginable accompli par des ouvriers d’une autre époque.

Les maisons enchevêtrées les unes dans les autres, les ruelles dessinées certainement sans plans, en tout cas c’est ce que cela m’inspirait, les jardinets créés à la va-vite. Même le cimetière semblait comme posé, là, un peu par hasard. Accolé à son église, simple petite parcelle dérisoire dans ce paysage grandiose, aux noms d’antan oubliés, certaines tombes n’étaient plus délimitées que par des lauzes rescapées.

Parlons de son église, ces habitants l’appellent Sainte-Cerice. Ce n’est pas réellement une église mais plutôt une chapelle, toute petite mais dans laquelle je me suis sentie totalement protégée, en paix. Quelques lumignons y brûlaient.

Lorsque je suis ressortie de ce lieu saint, mes yeux ont enregistré le décor se déroulant devant moi, sous moi. Tout en bas, à plusieurs centaines de mètres de mon emplacement de vigie, l’Ardèche m’attirait comme un aimant. Elle sinuait entre les rochers jaillissant de ses flots, calmes par endroit, ténébreux à certains passages. De mon promontoire, je n’apercevais qu’un filet insignifiant. Dès lors que l’on s’en approchait, elle prenait toute sa signification de rivière majestueuse.

Je crois n’avoir jamais ressenti tant d’éléments à la fois. Mes yeux enregistrant tous les détails, ma peau ressentant le vent et le soleil, mes oreilles captant uniquement le bruit de l’eau et des oiseaux dans les arbres. C’était surprenant tout ce que ces pierres rassemblées en ce village pittoresque, m’inspiraient.

Durant notre balade, nous n’avons rencontré que très peu de monde. Des touristes comme nous. Aucun habitant. Pourtant, ils étaient bien présents, dans leurs maisons. Je n’ai entendu ni musique, ni cris d’enfants, un peu comme si eux aussi étaient fossilisés en même temps que ce hameau si énigmatique à mes yeux de citadine.

Enfin, nous sommes redescendues, et je dois dire que cela a été bien plus facile qu’à la montée ! Quand nous avons atteint notre véhicule, je me suis retournée une dernière fois pour le contempler. Vogüé me regardait partir. Je pense que j’y reviendrai, dans quelques années, pour vérifier ma première impression. Et alors, je pourrai faire la comparaison avec mes écrits d’aujourd’hui, afin de savoir si mes sentiments du moment sont restés intacts, lorsque je relirai ces quelques lignes.

 

 

 

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