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8 décembre 2022

MELL ANTIGONE, par Jean-Marc Occhuizzo

Ce texte est extrait d’une longue nouvelle en cours de rédaction, inspirée par le thème Antigone. Jean-Marc Occhuizzo a situé son Antigone dans un futur peu enthousiasmant.

Je suis née du rejet et du mépris et j’ai voulu renverser la table des tyrans et de leurs maîtresses complaisantes. Aujourd’hui comme hier, un truc pareil ça ne se fait pas. Alors demain au lever du jour, ils vont rétablir les choses dans le bon ordre, rectifier la sauce chef, m’exécutant par injection létale, ou peut-être pas ...  Derrière la vitre, je les ai vus se préparer spécialement pour moi, comme des gens sages et pieux. C’est loi des hommes sentencieux. Et c’est ainsi.

J’ai sacrifié ma jeune vie pour ouvrir la voie à d’autres Antigone à venir. Du moins je l’espère. Le procès n’a été qu’une parodie sans surprise. Ces quatre murs griffés seront les derniers témoins de mon passage terrestre. Pourtant je n’ai aucun regret. Ni la moindre culpabilité, ce qui m’étonne un peu. Bref, je suis allée jusqu’au bout de la mission, certes dans la douleur et dans un bruit terrifiants. Cette fois-ci, ça s’est mal goupillé. Mes alliés sont tombés. Hélas ! leur courage et l’aide du bon Dieu n’ont pas suffi à changer la donne.

« Mell Antigone, vous êtes coupable de subversion contre la Cité, et d’assassinats ». Le monde s’est écroulé. Je suis consciente d’avoir échangé ma vie de petite reporter à perpette à la rubrique des faits divers, en un héroïsme malgré moi, l’héroïsme de ceux qui veulent ajouter leur pierre à l’édifice commun. J’ai été celle qui refusait le bon ordre établi des hauts dignitaires. Bien évidemment, depuis l’Antiquité, d’autres Antigone ont su dire NON, pour obtenir qu’un corps soit enseveli dignement. D’autres ont dit NON aussi, à la kommandantur en refusant de trahir, ou dans un bus du sud des Etats-Unis des années 1950, en refusant l’ordre ségrégationniste.

Il y a eu les Antigone des barricades, face à la mitraille noire ou rouge, qui haranguaient les foules, incitant le peuple à préférer mourir debout que de vivre à genoux. Certaines ont été exécutées, une normalité pour ces tyrans bravaches.

D’autres encore, innombrables, sont restées anonymes, pour avoir été réduites au silence et à la nuit. Mais toujours, le silence reste de courte durée, puisque le combat a perduré dans le temps.

Chaque fois c’est le même scénario. Un climat délétère, un élément déclencheur fait exploser le barrage, et la force des eaux vives jaillit à torrent. Un jour de printemps fleuri, une autre naîtra, avec un caractère plus convaincant. Alors la belle prendra le relais, libre Antigone ! La lutte d’Antigone est éternelle.

Bien à vous, Antigones du futur. Mell.

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