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26 juin 2009

Fontaine, par Christine Jouhaud Mille

     Regarde cette place je trouve ce lieu enchanteur, nous pourrions y consommer, dit-elle en le tirant par la manche. Oui tu as raison ! Il la suit et lorsqu’elle s’engage au milieu des tables il se met à opiner de la tête en suggérant, mais je préfère ce coin un peu isolé à coté du magnolia. Elle connaît la raison de sa proposition : il veut s’éloigner de la fontaine où des enfants sont assis sur le rebord de la vasque octogonale, elle ne reviendra pas sur le sujet épineux qu’il n’ait jamais voulu être père. Elle lui répond d’un ton neutre : Ah, oui ces enfants qui jouent à tremper les pieds dans l’eau !? Une bonne chose, ils ne vont pas rester longtemps dit-il, car il a remarqué un adulte sur le départ les bras chargés de vêtements. Il tire la chaise pour la faire asseoir et ne soupçonne pas que sa décision à réveillé en elle un regret. Le clapotis me rappelle le moulin, souligne-t-elle. Tu sais il m’a manqué parfois. Te souviens-tu des histoires, que je te racontais ? J’étais toujours l’héroïne qui cherchais et trouvais un trésor de pièces d’or; il y avait tellement de recoins. Il lui prend la main puis éclate de rire : Je me souviens de mon immersion dans la rivière pour retrouver la bague que je tu y avais jetée ! Elle pousse hors de la table avec un geste vif une feuille tombée : J’étais en colère ! Puis à son tour prise d’un fou rire : Tu es ressorti de l’eau avec l’anneau entre les dents tout en imitant le cri du phoque. Il fronce les sourcils : Oui mais je peux te dire que je n’en menais pas large, j’avais très peur de te perdre, il était impératif pour moi de retrouver la bague et ton amour. Elle tourne son regard vers la fontaine, l’eau claire en miroir s’est teintée aux couleurs du ciel où flottent des pétales roses échappés des arbres fleuris. Elle repense aux minuscules nénuphars sur l’étang avec son moulin du XVIème siècle, il avait un charme fou. D’un geste tendre il lui prend le menton pour qu’elle tourne la tête vers lui et son visage s’éclaire d’un sourire : j’ai compris tu veux y retourner ! Oui… et… non… répond-elle, dans ses yeux passe une ombre au reflet de ses pensées, elle ne peut lui dire que les années sont passées avec les illusions, qu’elle avait toujours voulu se persuader d’avoir résolu son désir d’enfant, pourtant… ils auraient emmené Il ou ELLE, au moulin pour chercher ensemble le trésor, elle aurait fait briller la petite flamme complice. Elle tourne alors de nouveau la tête vers la vasque silencieuse de cris où maintenant les oiseaux sont venus se désaltérer indifférents aux gens assis autour des tables ; et lui, la regarde sans arrière pensée.

Lundi 19 janvier 2009

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Commentaires
V
Tout au long de ce texte sensible et pudique, on ressent le regret de cette femme.
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