Reste encore, par Danièle Chauvin
Ce poème a été écrit après la lecture d'un texte de Jules Supervielle, "Saisir", qui mêle vers libres et vers réguliers. Le passage auquel répond ce poème est peut-être celui-ci:
Ce souvenir que l’on cache dans ses bras, à travers la fumée et les cris,
Comme une jeune femme échappée à l’incendie,
Il faudra bien l’étendre dans le lit blanc de la mémoire, aux rideaux tirés,
Et le regarder avec attention.
Reste encore
Souvenir tu m’appelles. Je voudrais résister.
Douce insistance, attirance, la nuit repoussée
Image floue, regard d’onde. Je me laisse faire
Refaire le chemin, redessiner tes mains
Quand je suivais ta voix dans l’or et la lumière.
Incertaine parole s’estompe avec le jour.
Remonter doucement tout le film à rebours.
Mon cœur s’accroche, retient le songe, déjà lointain.
Reste encore. Je ne dors. Garde-moi prisonnière
Des barreaux transparents des heures oubliées.
Attends encore un peu. Les contours effacés
S’impriment. S’éloigne ta silhouette à l’horizon
Du rêve. Paupières closes. La mémoire chancelle.
Aux rives du sommeil balance la nacelle.
Tu traverses le pont.
Danièle Chauvin