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14 juin 2014

L, par Michelle Jolly

Piste d'écriture: une nouvelle de Marcel Béalu tirée du recueil Mémoires de l'ombre, Phébus, 1986, et qui commence ainsi : "Plusieurs choses auraient dû la trahir: sa marche ailée parfois, ses façons de s'ébrouer derrière le rideau de la salle de bains..." Alors que la nouvelle est écrite du point de vue de l'homme, Michelle a choisi pour son texte celui de la femme. 

"…Plusieurs choses auraient dû m’avertir : son regard insistant et fixe, ses critiques quand je prenais ma douche me reprochant de mettre de l’eau partout, et ces remarques ironiques sur les bruits bizarres que je faisais en dormant ! j’ai toujours grincé des dents la nuit, ma grand-mère chez qui je dormais enfant, s’en souvenait. Au début, je prenais pour un amour exigeant l’attention excessive qu’il me manifestait, toutes ces remontrances, ces critiques, je ne m’y habituais pas ; j’étais une femme pas une adolescente à modeler suivant son bon plaisir.

De longues années nous avons marché ainsi en parallèle sur des chemins de plus en plus différents. Il me croyait gracile et malléable alors que je me sentais solide et déterminée ; je tenais bon, et restais, mais je sentais le verrou s’ouvrir petit à petit, me débattant contre un mur de certitudes qu’il avait bâti, imaginant la place qu’il m’attribuait, fragile, légère, dépendante de son bon vouloir.

Ce fut à la fin d’une journée ensoleillée de septembre il y a un an, nous étions sur la route, en promenade près du lac ; nous étions silencieux, rien à nous dire, et le silence pesait lourd. Je retardais la marche car j’avais décidé de fuir, loin, très loin. J’avais, la veille essayé pour la énième fois de me faire comprendre, expliqué mes désirs, mes projets, il n’avait pas compris, souriant devant mon audace, m’opposant le béton de ses raisonnables décisions. J’avais eu l’impression de me noyer une nouvelle fois, alors j’avais décidé qu’après la rituelle promenade, près du lac, je partirais..

Un moment, il s’arrêta, la vue était superbe, je le laissais à sa contemplation, me glissait en contre bas sur le chemin de halage, et je courrais…

J’ai appris qu’après l’orage il a raconté une histoire invraisemblable, ses amis crurent à un délire, aujourd’hui ils en rient et moi aussi. Maintenant je lui pardonne, faut dire que mon prénom qu’il adorait prêtait aux fantasmes : on m’a appelée Leda."

 

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