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12 février 2009

Ici et maintenant / Là-bas et avant

Moi qui étais le roi, voilà comment je finis seul dans la rue abandonné de tous. Pourtant il y a seulement quelques jours en arrière, j’étais richement paré, le centre d’intérêt de tous. Plus personne ne veut de ma présence. Plus personne ne veut de moi. J’ai encore gardé de ma superbe même si je se suis plus paré comme autrefois. Une autre fois pas si lointaine. Déraciné, oublié.

- Hein ? Il te raconte tout çà ? Tu te moques de moi ! Comment un sapin peut-il parler ? Je ne l’entends pas.

- Oui, il parle mais avec son propre langage sylvestre. Je reçois plus des sensations, des impressions que des paroles.

On m’avait dit qu’elle était bizarre, et c’était vrai. Quand on la voyait avec son visage angélique et ses grands yeux marron, elle avait l’air complètement normal et surtout jolie. Il me revaudra cela Damien. Occupe-toi de ma cousine m’avait-il supplié. Je l’avais trouvée bien attirante cette fameuse cousine. Etonné d’être le seul à bien vouloir lui tenir compagnie toute une après midi. J’étais le seul pauvre idiot à ignorer son originalité. Les copains s’étaient esclaffés en apprenant que je sortais la cousine.

- On ne peut pas le laisser là tout seul. Le pauvre.

Bonté divine, elle s’inquiétait pour un sapin. Elle n’allait pas m’obliger à le prendre sous les bras quand même ? Non mais je rêve, elle parlait au sapin. On avait l’air fin dans la rue. Elle s’agenouillait près du sapin et moi, grand dadet, debout à côté d’elle.

Ne me laisse pas tout seul ici. Je veux revoir ma forêt, mes frères une dernière fois avant de disparaître. S’il te plait.

- Ne t’inquiète pas, nous allons te ramener dans ta forêt.

- Cela ne va pas être possible d’abord on ne sait pas d’où il vient (mais qu’est-ce que je raconte) et puis on n’a pas le temps.

- Mais n’as-tu pas entendu à quel point il est désespéré ?

- Non, je n’ai rien entendu et puis cela ne nous concerne pas. Après tout, ceux qui l’ont acheté n’ont qu’à se charger de le ramener. On n’abandonne pas son sapin dans la rue comme cela.

Elle se planta devant moi, ses grands yeux marron larmoyant, une petite moue suppliante. Elle posa sa main sur ma poitrine. A peine l’eût-elle posé que je me suis senti aspiré à une vitesse vertigineuse dans un tunnel de lumière. D’un seul coup, je me retrouvais suspendu au-dessus d’une forêt. Etrangement, je savais où j’étais, je savais également que j’étais dans une époque lointaine même si je ne savais pas quand exactement. Autour de moi, virevoltait la cousine. Deux fines ailes étaient accrochées à son dos, ses longs cheveux roux étaient retenus par des tresses de lierre. Une fine robe de fils d’argent recouvrait son corps. Elle était lumineuse, belle à couper le souffle.

- Sylvelthin, te souviens-tu du temps où j’étais une fée et toi un elfe ?

- Un elfe ?

Moi, un elfe. Non, ce n’était pas possible. Si j’en étais un, je devrais porter une tenue ridicule. Je n’osais me regarder. La simple idée de porter des collants verts style robin des bois me donnait la nausée. Je devais être ridicule dans une tenue pareille. Je ne tournais pas rond. Je m’inquiétais pour mon look alors que j’étais toujours en apesanteur au-dessus de la forêt. Puis depuis quand je pouvais être si haut perché sans avoir le vertige ? J’ai peur du vide moi.

- Ne lutte pas ! Me conseilla ma belle fée. Laisse les souvenirs remontaient en toi. Souviens-toi comme tu aimais la forêt, comment tu prenais soin d’elle.

Lequel de nous deux était le plus fou à lier : elle qui me parlait d’un temps inconnu ou moi qui commence à croire ce qu’elle me racontait

Pourtant, je ne rêvais pas. Je voyais resurgir différentes scènes. Je me revoyais enfant, puis passant l’initiation qui me donna le nom d’elfe adulte de Sylvelthin. J’étais du clan des elfes sylvains, ma famille était d’une lignée de soigneurs de la forêt. Je détenais le savoir de mes ancêtres. Nous maintenions l’équilibre des forêts des différents mondes…

Puis, le jour maudit arriva. Ce jour maudit qui vit les hommes détruire notre forêt à coup de haches et de scies. La dernière chose dont je me souvienne : un sifflement et une douleur horrible dans mon cou. Une flèche empoisonnée venait de me transpercer. Les images se brouillaient dans ma tête. Je fus aspiré à nouveau dans le tunnel de lumière.

- Sylvain ? Sylvain ? Tu vas bien ?

Je me sentais mal. J’étais déstabilisé.

- Floriane, te souviens-tu du temps où tu étais une fée ?

Elle regarda en souriant. Puis, elle me répondit :

- Je suis toujours une fée.

Elle me prit par le bras.

- Viens, nous allons ramener ce sapin dans sa forêt.

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