Suivront mille ans de calme... un spectacle d'A. PRELJOCAJ, par Adrien Duplay
Ce texte a été écrit dans le cadre d’un atelier d’écriture autour du spectacle donné pour Montpellier danse. Adrien m'a proposé de le publier sur le blog, ce que j'ai bien volontiers accepté... La critique, lorsqu'elle est bien écrite, est un genre littéraire !
Suivront mille ans de calme
Angelin PRELJOCAJ se confronte à la Russie éternelle. La compagnie emblématique du Bolchoï l’a invité l’an dernier pour une création où collaboraient les danseurs des deux compagnies, avec des représentations à Moscou et en France. Cette année il reprend le spectacle avec sa seule compagnie.
Il est servi par la musique musclée de Laurent Garnier, caméléon qui se transfigure au gré du ballet entre grilles rythmiques multiformes et reprises romantiques à peine trafiquées.
L’Apocalypse soulève le voile et nous révèle les replis de nos existences. Suivront mille ans de calme. Par les temps qui courent, il faut être sacrément optimiste !
Ainsi défilent les fragments de nos existences vécues ou rêvées. Foisonnement syncrétique, organique, activiste, machiniste dont les rouages bien huilés sont les muscles et les souples articulations des danseurs. Anges et diables vont se succéder, masques cérémoniels et regards démasqués, corps infatigables…
Des postures animales réveillent notre dégoût et notre fascination. De splendides bacchanales nous laissent frustrés et bêtement voyeurs sur nos sièges.
La machine revient, comme un antique métier à tisser, face à un bouffon hurlant. Les danseurs tournent et retournent des pages comme un défi à l’esprit. Danse insatiable dynamisée par des boucles percussives insistantes.
La femme prend toutes les couleurs de son destin. Spirituelle danseuse, amoureuse, araignée coincée par son Roméo masqué, pute provocante des bas quartiers, poupées démantibulées manipulées par des mégères.
En fin de parcours, catharsis sur les drapeaux des nations, lavés à grande eau. La purification tombe sur la scène comme une giboulée salvatrice. Scène finale de l’innocence retrouvée, où deux agneaux se joignent gentiment aux danseurs. Ni sauveur, ni bouc émissaire en vue.
Manque la confrontation physique avec les danseurs classiques du Bolchoï. Peut-être reviendra-t-elle ?
La photo a été empruntée au blog Critiphotodanse.e-monsite.com