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19 décembre 2011

Louise Bonne, par Aline

Les séances "Ecrire avec les sens du goût et de l'odorat" ont inspiré cette savoureuse histoire à Aline...

Louise Bonne

 

louisebonne1Louise Bonne se réveilla un matin avec un goût de bout du monde, comme un brin d’épice sur les lèvres, une sensation que jusqu’à ce jour elle n’avait jamais éprouvée.

Elle ouvrit sa fenêtre sur le jour qui se levait.

Au loin le soleil jaillissait comme une coulée de caramel qui aurait glissé à l’intérieur d’elle-même.

Salé sucré, voilà un drôle de mélange, cela n’était pas dans ses goûts culinaires habituels.

Ses réveils avaient longtemps été difficiles. Il circulait en elle comme un goût amer, une répugnance à se jeter dans la vie ; cette vie limitée loin de la vie rêvée.

***

La cuisine pour Louise était depuis l’enfance, le lieu sacré de toutes les femmes de sa famille. Elle en avait fait son héritage, apprenant toute jeune, par le menu, les petites tâches :

Eplucher finement une pomme de terre,

Trancher en quartiers une tomate sans l’écraser,

Peler des oignons sans pleurer, etc…

Du jardin familial, les parfums avaient éveillé ses sens ; le matin elle allait respirer la fragrance des lilas, cueillait les fraises qu’elle portait à sa bouche en fermant les yeux pour mieux en imprégner ses papilles. Le jus acidulé du précieux fruit s’écoulait alors sans résistance dans sa bouche et glissait jusqu’au fond d’elle-même avec une douceur infinie…

N’ayant pas un haut niveau scolaire, elle était entrée par la petite porte dans le monde de la restauration. Elle avait trouvé du travail dans un petit restaurant de quartier. Faire parfois la plonge et être obligée de renifler les restes refroidis de poulet et autres légumes aux odeurs nauséabondes, cela ne lui plaisait pas à Louise, elle qui briguait en toute chose l’excellence, jusque dans l’esthétique ! Toutes ces années à lutter pour s’en sortir…

Cette nuit pourtant il lui avait semblé être entrée dans un grand restaurant. Une coupe de champagne à la main, elle sirotait le précieux liquide et laissait pénétrer en elle les divines bulles, capiteuses, délicieuses, d’une année exceptionnelle.

***

STOP ! Soudain Louise Bonne sortit de ses songes pour de bon, et osa ouvrir le courrier posé sur sa table de nuit ! Elle eut encore quelques minutes d’hésitation avant de lire, et revit une dernière fois le chemin parcouru.

Après des années d’esclavage d’arrière-cuisine, elle avait mis assez d’argent de côté pour reprendre ses études. La difficulté que représentait pour elle la poursuite de ses cours, le stress des concours pour entrer dans la meilleure école de cuisine, l’obstination qu’elle avait mise à apporter sa touche personnelle, au milieu des plus grands…

louisebonne2Aujourd’hui en ouvrant cette lettre, l’angoisse l’étreint. Va-t-elle franchir le pas ? Est-ce que ce sera le début de la grande aventure ?

La lettre dit oui. Oui ! C’est sûr désormais, elle partira pour Hong-Kong ouvrir son premier restaurant. Elle mettra dans sa valise les trésors culinaires accumulés par plusieurs générations. Louise Bonne ne doute plus, sur une enseigne lumineuse son nom brillera comme une étoile au firmament. Elle a déjà choisi le symbole qui s’y associera : une poire bien sûr, la « Louise Bonne ».

Aline

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