Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Ateliers d'écriture et d'accompagnement à Montpellier ou par Zoom
Newsletter
Publicité
Archives
19 octobre 2011

Ce dimanche à Pâques fleuries, par Jean-Claude Boyrie

"Au bout du chemin"- Épisode n° 5 (intermède poétique)

DIMENYE

« Ce dimanche à Pâques-fleuries» :

 

On entendait au loin sur la terre endormie

sonner la cloche au lourd battant.

Le chemin s'ouvrait dans la bruyère fleurie

où va l'abeille butinant,

sillon, moite fêlure en la forêt creusée.

L'aînée avançait prestement,

levant, pour se garder des gouttes de rosée,

le bas de sa robe, en marchant.

Janine était presque adolescente, un âge

où l'on se détache des jeux

de l'enfance et l'on devine un nouveau rivage

à l'horizon, mystérieux.

 

Catherine, sa soeur cadette - et son contraire -

aussi flexible que les joncs,

et plus vive que l'air, capricieuse et légère

virevoltait dans les buissons :

« Attention à ta robe ! Arrête, Catherine !

Tu risques de la déchirer ! »

Mais qui pourrait calmer cette espiègle gamine ?

À quoi bon la réprimander ?

Catherine tenait, comme eût fait une mère,

son petit frère par la main.

Pierrot s'émerveillait, trottinant par derrière,

des mille fleurs sur son chemin.

Le sentier, blanc de sable et roux d'aiguilles rêches,

disparaissait, se retrouvait,

sinuant, indécis, dans les broussailles sèches

comme eût fait un serpent lové.

Un frais soleil d'avril diffusait sous les cimes,

sa lumière jusqu'au hallier,

faisant naître des traits d'argent, cierges infimes,

au flanc de l'arbre entaillé.

D'un nuage entrevu se devinait sous branches,

dans le clair-obscur du sous-bois,

le doux camaïeu de teintes blondes et blanches,

étrange arabesque à la fois.

 

Le sentier bifurquait en suivant le sillage

ancien des troupeaux de moutons

qui s'engouffraient par là, laissant sur leur passage

des brins de laine accrochée aux ajoncs.

Par ici transhumaient, au milieu des sonnailles,

le bélier, la brebis et l'agneau,

sous les cris des bergers, appelant leurs ouailles,

dans la poussière du hameau.
Par derrière venait, tout au bout de la file,

au mouvement de son fuseau,

le pasteur-échassier, suivant d'un pas tranquille

la marche lente du troupeau.

 

C'était jadis la tradition, dans les villages

de placer au détour du chemin

de pâles reposoirs, îlots de fleur sauvages,

en prévision du Jeudi Saint.

À leur ferveur était mêlée

la suave odeur des lis blancs :

des grains jetés dans l'ostensoir à la volée,

s'échappaient des vapeurs d'encens.

L'église était ce coeur de la forêt profonde

vers où menaient tous les sentiers.

Agneau de Dieu, qui portes les péchés du monde,

aujourd'hui, donne nous la paix !

 

Les années ont passé ; tout est là, plein de vie.

C'est dimanche, et toujours l'on entend

sonner dans le lointain, sur la lande assoupie

la même cloche au lourd battant.
Elle sonne, frais carillon, Pâques fleuries,

fête le retour du printemps,

et recrée un parfum d'anciennes rêveries,

mêlé de résine et d'encens.

Enfants endimanchés – souvenir de jeunesse -

quand sur le parvis réunis,

nous tenions d'une main notre livre de messe

et de l'autre, un rameau de buis.

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité